Que de fois la production de chants en français pour la messe n’a-t-elle pas été mise en cause ! Souvent celle-ci est décriée. On parle de « cantiques-minutes » ou de « chants-kleenex » voulant signifier par là le peu d’intérêt de ces chants supposés vite composés et appelés à vite disparaître du répertoire pour y être remplacés par d’autres. On en est souvent à regretter le chant grégorien tel que nous l’imaginons, c’est-à-dire dans une qualité d’interprétation qui, bien souvent, n’était et n’est encore que l’apanage de certaines abbayes.

On peut tout de même se demander si, dans une production de plus de dix mille chants destinés à la liturgie, on n’en trouverait pas quelques-uns de qualité. Encore faut-il chercher du bon côté !

Plaçons-nous tout d’abord sur le plan de la qualité musicale et voyons si des compositeurs que l’on ne peut soupçonner d’incompétence ont écrit pour la liturgie en français. Dès le début du chant liturgique en français, nous trouvons les noms de Jean Langlais (1907-1991), de Gaston Litaize (1909-1991) et de Joseph Samson (1888-1957). Du premier, figure encore dans les recueils de chants, Missel Noté de l’Assemblée (MNA) et Chants Notés de l’Assemblée (CNA) le beau cantique à la Vierge, V 21, Gloire à toi, Marie. On trouve aussi dans le MNA F 64, Dieu, nous avons vu ta gloire. G. Litaize a publié plusieurs chants aux éditions Europart. On peut en trouver la liste sur le site du SECLI (Secrétariat des Editeurs de Chants Liturgiques). Quant à J. Samson, il a marqué par ses « Psaumes-chorals », les premiers dans le genre. Ceux-ci viennent d’être réédités par Voix Nouvelles accompagnés d’un bel enregistrement réalisé par J.-L. Gand et l’ensemble Joseph Samson chez Hortus[1]. Deux psaumes (23 et 116) et le Magnificat figurent dans le MNA.

Parmi les musiciens professionnels, citons le Père Marcel Godard (1920-2007), compositeurs de pièces instrumentales, notamment Le petit livre d’orgue et Dix petites tapisseries pour orgue[2], de plusieurs Cantates, des Vêpres de l’Immacuée et de nombreux chants liturgiques[3] écrits principalement pour les monastères, mais aussi pour les paroisses. Citons par exemple D 140-2, Celui qui a mangé de ce pain, adaptation du choral Schmücke dich, o liebe Seele, G 79-2, Ouvre mes yeux, Seigneur, G 103, Venez au jour et SL 33-5, Je crois que mon Sauveur est vivant composé pour les funérailles.

Les chants d’Etienne Daniel sont aussi à découvrir. Ce musicien nantais est bien connu de ceux qui fréquentent le Mouvement A Cœur Joie tant comme compositeur de chœurs et de cantates profanes que comme arrangeur de chansons françaises. Sollicité par Didier Rimaud, il a également composé La Cantate en forme de Colombe, qui contient une belle hymne à l’Esprit Saint, Redressez-vous, prenez l’Esprit, et plusieurs chants pour la liturgie. Le site du SECLI en relève une quarantaine. L’assemblée et les chorales auront plaisir à découvrir et à chanter D 574, Mendiant du jour, C 200-2, En mémoire de toi, I 34-92-8, Jour du Vivant et sa Messe du Partage éditée chez Bayard.

Roger Calmel (1920-1998), également compositeur pour A Cœur Joie[4] et, lui aussi, sollicité par Didier Rimaud, nous laisse deux chants liturgiques publiés par l’Union Sainte Cécile de Strasbourg : U 18-64, Alléluia, rendez grâce et le beau chant de communion USC 651, A la table du Seigneur, deux pièces écrites à l’origine pour sa Messe Terre Nouvelle (1992). Notons au passage l’existence de la Messe pour les Paroisses (AL 40-84) de Xavier Darasse[5] (1934-1992) dont le Notre Père (Dlh 109) est fréquemment chanté par des assemblées chrétiennes.

Parmi les compositeurs de métier ne peut-on admettre Joseph Gelineau (1920-2008), diplômé de l’Ecole César Franck à Paris où il étudia la composition avec Guy de Lioncourt, élève lui-même de Vincent d’Indy ? A côté d’une recherche modale pour le chant des psaumes en français, J. Gelineau nous laisse de nombreuses hymnes[6] et tropaires[7] de qualité à côté d’un Requiem en français, Qu’il repose, du Psaume 106, L’Amour du Seigneur[8] et du Cantiques des cantiques[9].

Parmi les compositeurs qui nous ont quittés, on ne peut passer sous silence les noms de Jacques Berthier (1923-1994), de Claude Duchesneau (1936-2003) et de Christian Villeneuve (1948-2001). Le premier, fils de Paul Berthier, maître de chapelle à la cathédrale d’Auxerre, fit, lui aussi, ses études musicale à l’Ecole César Franck de Paris. Habitué aux motets et aux messes polyphoniques, il accepta, non sans difficultés, de se mettre au service de la liturgie en français. Organiste pendant de nombreuses années à l’église Saint-Ignace à Paris où le Père Gelineau dirigeait la chorale Hosanna, il fut tout d’abord connu par les chants qu’il composa pour Taizé à la demande du frère Robert. C’est peut-être lui qui introduisit dans le chant liturgique les formes du canon et de l’ostinato. Le système de cellules tonales qu’il adopta pour permettre aux musiciens et chanteurs de passage à Taizé de se joindre aisément à la liturgie des moines est très astucieux et remarquable. Ce répertoire s’est diffusé dans le monde entier ! L’autre œuvre qui fit connaître Jacques Berthier dans les paroisses est certainement la messe Que tes œuvres sont belles (1984), qui, à l’origine, était destinée à un rassemblement des Scouts de France en 1983. Mais on n’est pas maître de la diffusion ! Suivrons ensuite plusieurs messes écrites sur des textes de D. Rimaud et de nombreux chants liturgiques pour les monastères[10] et les paroisses[11].

Le second, membre de l’équipe des prêtres de Saint-Séverin à Paris, liturgiste et musicien, grand amateur de Bach, collaborera avec les organistes Michel Chapuis, Francis Chapelet et Jean Boyer pour créer un répertoire de chants liturgiques inspirés du choral luthérien et du psaume huguenot. On peut prendre connaissance de ces chants dans le recueil Répertoire de Saint-Severin, 30 ans de musique au service de l’assemblée édité par Voix Nouvelles en 2003.

Christian Villeneuve appartient à une génération plus jeune de musiciens professionnels intéressés par la musique liturgique. Hélas, il nous a quitté en pleine force de l’âge. Les chants et les compositions qu’il nous laisse sont novatrices non seulement par le langage harmonique utilisé mais aussi par les formes utilisées. Professeur d’écriture au Conservatoire National de Région de Nantes, c’est à nouveau sollicité par D. Rimaud qu’il se lança dans la composition de chants pour la liturgie[12]. Ceux-ci demandent généralement un bon organiste qui joue l’accompagnement prévu par le compositeur et un chantre-animateur compétent. Dès que l’on est familiarisé avec la pièce, celle-ci apparaît beaucoup moins difficile dans sa mise en œuvre qu’elle n’apparaît à la première lecture ! Dans la lignée de J. Samson, Ch. Villeneuve a publié deux cahiers de Psaumes-Chorals aux éditions Voix Nouvelles[13]. La revue du même nom et autrefois Chorsites ont publié plusieurs de ses chants[14]. Citons par exemple K 64-4, Peuple pour la justice, qui figure dans le MNA, I 303, Parole de Dieu qui crée l’univers, la petite hymne Près de toi, le tropaire K 20-38, Pour avancer ensemble

Parmi les compositeurs actuels, nous pouvons citer les noms de Jean-Michel Dieuaide[15], ancien directeur de « Musique sacrée à Notre-Dame de Paris » et aujourd’hui président de l’Association des Chorales Liturgiques (Ancoli) de France et inspecteur de la musique de la ville de Paris, de Patrick Lamon[16], directeur du chœur de la Cathédrale de Montpellier et de l’ensemble diocésain, Yves Lafargues (1969 – )[17], Professeur d’orgue du CNR de Lyon, organiste titulaire de la basilique Notre-Dame de Fourvière et suppléant à la primatiale Saint-Jean de Lyon., Isabelle Fontaine (1975 – )[18], organiste titulaire de la Cathédrale de Soissons, Virginie Delorme (1977 – ), organiste de la paroisse Saint-Ruf à Avignon, les compositeurs du Centre de Musique Sacrée de Sainte-Anne d’Auray, des compositeurs alsaciens tels qu’Alain Langrée (1927 – ), Damien Simon (1971 – ), professeur l’orgue au Conservatoire National de Région de Rennes et organiste-titulaire de l¹Eglise St-Paul de Strasbourg…

Quelques enregistrements peuvent aussi témoigner de la qualité de chants liturgiques en français. Je retiendrais tout d’abord les trois CD[19] réalisés par le CNPL en lien avec la Promotion annuelle des chants liturgiques réalisée par la Commission épiscopale de liturgie et de pastorale sacramentelle. Cette Promotion existe depuis 1993. Ensuite, nous avons la très belle collection des sept CD éditée par Magnificat[20]. Le plus remarquable est certainement celui des Hymnes Mariales par l’Ensemble vocal, Chœur d’enfants de Saint-Christophe de Javel, dirigé par Lionel Saw, actuellement chef de chœur de la Maîtrise de Notre-Dame de Paris, qui signe aussi les arrangements de plusieurs chants.

Dans ce premier article, nous nous sommes placés sur le plan de la qualité musicale en évoquant un certain nombre de compositeurs patentés qui ont accepté d’écrire pour la liturgie. Nous avons aussi privilégié le répertoire destiné aux paroisses. Il ne faudrait pas passer sous silence tout le travail musical qui a été mené dans les monastères avec l’aide également de musiciens professionnels. Cet aspect sera traité dans un prochain article. Restera ensuite à s’interroger sur la qualité d’un chant liturgique, car celle-ci ne se résume pas uniquement à sa dimension musicale.

N’y a-t-il vraiment pas de bons chants liturgiques en français ? (2ème partie)

Notre premier article s’intéressait principalement au répertoire destiné prioritairement à des paroisses. Nous terminions en évoquant le fait que tout un travail de composition avec des musiciens professionnels avait également été réalisé pour le monde monastique. Recherche parallèle ? En grande partie, sans doute. Mais nous verrons que des échanges se sont tout de même produits entre ces deux pôles musicaux : la paroisse et le monastère.

C’est en 1967 que furent donnés les premiers indults autorisant l’utilisation de la langue française dans la liturgie de certains monastères[21]. Très rapidement, cette première brèche s’élargit et il fallut faire appel à des auteurs et des compositeurs pour “créer” un nouveau répertoire monastique en langue française. Un groupe de moines et de moniales se constitua et prit le nom de Chant et Monastères. Celui-ci organisa des sessions et publia une revue. Ce groupe se donna aussi trois missions : proposer une sélection parmi les productions de l’époque de pièces adaptées à l’office, désirant ainsi répondre assez rapidement aux questions qui se posaient[22], promouvoir la création de textes et de mélodies et susciter la recherche.

Des moines-musiciens se mirent donc à créer de nouveaux chants pour l’Office. Pour superviser leur travail et approfondir leur formation musicale, ils firent appel à un compositeur professionnel : Victor Martin(+ 2007). Celui-ci composa de nombreuses pièces pour la liturgie. Avec la musique de Victor Martin se posa la question de la place d’une musique “contemporaine” dans la liturgie[23]. En effet, ses rythmes et ses harmonies surprennent. La mise en œuvre de ses compositions n’est pas simple. Son disque Psalmodies[24] est un bon exemple sonore de ses compositions pour la Liturgie des Heures. La musique de Victor Martin ne fut pas pratiquée dans les paroisses. On pourrait dire que V. Martin fit école, notamment par les ateliers de composition qu’il assura pour les moines-compositeurs. Plusieurs écrivirent dans ce style. Citons par exemple Jacques Audebert de l’abbaye Saint-Benoît-sur-Loire[25]. C’est d’ailleurs pour cette communauté monastique que V. Martin écrivit beaucoup de ses pièces destinées à l’Office.

En regardant les publications de ces années 70, on trouve aussi les noms de compositeurs tels que Georges Migot (1891-1976), Antoine Toulmonde ( 1901-1993), César Geoffray (1901-1972).

Sans doute est-il intéressant de rappeler qu’au moment de la parution de la traduction du Psautier de la Bible de Jérusalem, ce musicien, fondateur du mouvement choral A Cœur Joie, composa, à la demande de J. Gelineau, et à la suite de J. Samson, huit psaumes-chorals[26] pour les paroisses. Ceux-ci sont écrits dans un langage harmonique quelque peu “contemporain”. Il composa aussi plusieurs chants pour les paroisses[27], des hymnes et des tropaires monastiques. Ses compositions destinées à l’Office sont éditées par le Livre d’heures d’En Calcat qui assura dès la fin des années 60 l’édition et la diffusion du répertoire des chants monastiques avec la cote lh. Citons par exemple l’hymne pour l’Ascension Jlh 106, Entré dans la gloire, ou le tropaire pour la fête de l’Immaculée Conception (8 décembre) Vlh 117-2, Voici l’aurore avant le jour. Signalons parmi les compositions de ce musicien les 5 hymnes publiées dans le recueil Dieu s’est fait homme et enregistrées sur le disque Hymnes Nouvelles, SM 30M-465, paru en 1972[28]. A propos du langage harmonique de ces hymnes, César Geoffray parle lui-même de « couleurs inhabituelles ».

Un autre compositeur professionnel qui contribua à l’élaboration de ce répertoire monastique en langue française fut Maxime Jacob (1906-1977). Elève de Charles Koechlin et d’André Gedalge, il rencontra Erik Satie grâce à Milhaud. Il devint ensuite membre de l’école d’Arcueil avec Henri Sauget et Henri Cliquet-Pleyel. Il composa beaucoup pour l’abbaye d’En Calcat (Tarn) où il était entré comme moine sous le nom de Dom Clément Jacob[29].

Si l’on parcours les productions monastiques qui ont vu le jour depuis trente ans[30], nous trouvons encore plusieurs noms de compositeurs professionnels. Notamment celui de Francine Guiberteau (1941 – ), ancienne élève d’Olivier Messiaen et professeur d’écriture au conservatoire du Mans jusqu’en 2006. Dans sa musique liturgique sont présents plusieurs styles d’écriture musicale allant d’un style classique modal à un style d’écriture utilisant les modes à transpositions limitées de Messiaen[31] en passant par le choral à la manière de J.-S. Bach[32]. Ses compositions pour l’Office sont principalement publiées au Livre d’Heures d’En Calcat[33].

Figurent aussi deux partitions de Jean-Louis Florentz (1947-2004), un tropaire pour le 15ème dimanche de l’année A, Comme à l’aube du premier jour (79-83)[34], et un Poème liturgique intitulé Mémoire de la Dédicace d’une Eglise (79-92). Ont-elles jamais été chantées ? On y découvre aussi quelques partitions de Jean-Louis Gand, actuel directeur du Conservatoire de Dijon. Ce compositeur qui a commencé à pratiquer la musique à la Maîtrise de la Cathédrale de Dijon sous la direction de Joseph Samson, fut sollicité à l’occasion du IXe centenaire de la naissance de Saint Bernard. Il composa pour cette circonstance les premières et secondes vêpres de la fête[35].

Un musicien connu avant tout comme chef de chœur, Stéphane Caillat (1928 -)[36], a beaucoup composé pour les monastères. Son écriture est modale, mais l’assimilation de la ligne mélodique demande un certain travail. Le désir de ce musicien est d’ailleurs de “surprendre” et d’éviter les conduites mélodiques trop évidentes. Les couleurs harmoniques sont recherchées. La plupart du temps, les accompagnements sont obligés. Quasi aucun chant n’a trouvé place dans le répertoire paroissial alors que certains textes utilisés y sont chantés avec d’autres musiques[37].

Les deux compositeurs que nous mentionnons maintenant ont déjà été présentés dans notre premier article : Christian Villeneuve (1948-2001)[38] et Marcel Godard (1920-2007). En 1984, les moniales de l’Abbaye de Laval enregistrent un disque, Veillez et priez, avec des chants de Jacques Berthier et Christian Villeneuve sur des textes de D. Rimaud et P. de La Tour du Pin. C’est vraisemblablement le premier enregistrement de pièces de Ch. Villeneuve destinées à l’Office monastique. Y figurent K 64-4, Peuple choisi et N 23-3, Heureux ceux que Dieu a choisis, deux hymnes qui ont aussi trouvé place dans le répertoire paroissial[39]. Des chants comme Hlh 113-3, Dieu au-delà de tout créé, I 288-1, Comme nous allions rêvant Dieu et H 178-1, Veilleurs, tenez-vous en éveil témoignent d’un recherche d’un langage musical plus contemporain pour la liturgie. La mise en œuvre du psaume 121, ZL 121-3, Paix sur Jérusalem, est aussi novatrice. Par la suite, Christian Villeneuve a continué à écrire de nombreux pièces pour le monde monastique. Chacune d’elles est intéressante par la qualité de sa ligne mélodique et l’originalité de son accompagnement harmonique[40].

Le travail de Marcel Godard avec le monde monastique a tout d’abord été associé avec le Carmel de la Paix de Mazille, situé près de Cluny, pour laquelle il écrivit des pièces d’un langage nouveau[41]. Celles-ci se caractérisaient par un langage harmonique inspiré de l’Ecole française du début du XXe siècle (notamment Debussy), l’usage quelques fois des modes de Messiaen, et une fluidité de la ligne mélodique. Ces chants pour Mazille sont aussi parfois caractérisés par un accompagnement à la cithare, instrument pour lequel Marcel Godard écrivit de très jolies pièces instrumentales[42]. Par la suite, le Père Godard composa pour de nombreux monastères dont Pradines, Chalais, Chambarand, Tamié… L’œuvre de M. Godard pour la Liturgie des Heures est abondante[43]. Le musicologue lyonnais, Laurent Grégoire, lui a consacré une étude qu’il a illustrée de manière sonore avec un très bel enregistrement : Une musique aux nombreuses demeures[44].

Le dernier compositeur que nous présentons est Henri Dumas (1933- ). Lyonnais, il est l’élève de Marcel Godard. Connu dans les paroisses par quelques chants comme Plh 168, Encore un peu de temps, le Seigneur sera là, I 97-4, Regarde où nous risquons d’aller, E 121-1, Un cri retentira dans la nuit, le Père Dumas a essentiellement composé pour les monastères[45]. Il possède un style d’écriture musical bien personnel, soucieux de couleurs harmoniques originales. « Plein d’estime pour le grégorien qu’il a pratiqué depuis l’enfance, il cherche pourtant, à l’école de musiciens tels que Debussy, Ravel ou Poulenc qui l’ont marqué, d’autres couleurs modales soutenue par une harmonie raffinée. » (Sr. Etienne Reynaud) Au début, le Père Dumas a beaucoup collaboré avec l’Abbaye de Pradines, située près de Roanne. Par la suite, il composa aussi pour de nombreux monastères dont celui de Tamié. Cette abbaye cistercienne vient d’enregistrer plusieurs œuvres de ce compositeur, caractérisant divers moments de l’année liturgique[46]. Ces pièces, écrites sur des textes de la Commission Francophone Cistercienne (CFC) et de D ; Rimaud, sont des hymnes et des tropaires (Stance – refrain – versets). Cet enregistrement nous offre des exemples caractéristiques de l’écriture musicale du Père Dumas.

Dans cette seconde partie, nous avons essayé de montrer qu’en faisant appel à des musiciens professionnels, les monastères ont été et sont toujours à la source d’une production de musique liturgique de qualité[47]. Des pièces de ce répertoire sont quelques fois chantées dans les paroisses, notamment des hymnes et des tropaires. Le Père Dumas est d’avis qu’à l’avenir « le répertoire monastique, notamment celui des tropaires, débordera un jour ce cadre pour enrichir le répertoire paroissial. » Pourquoi pas ? Ces deux répertoires ne sont nullement en opposition et des passerelles peuvent s’établir entre les deux[48].

Un bon chant liturgique, c’est non seulement une bonne musique mais aussi un bon texte ! Dans notre prochain article, nous essayerons de déterminer ce qui fait qu’un texte peut être considéré comme un “bon texte” de chant liturgique.

N’y a-t-il vraiment pas de bons chants liturgiques en français ? (3ème partie)

Les deux premiers articles s’intéressaient plus particulièrement à la musique des chants liturgiques. Il va de soi qu’un chant se compose non seulement d’une musique mais également d’un texte. Et on est en droit de se demander si, dans le chant liturgique, le texte n’est pas plus important que la musique. En effet, des titres d’articles tels La foi de nos cantiques[49] ou de livres tels Dis-moi ce que tu chantes[50], suggèrent que les paroles des chants ne sont nullement secondaires, car elles inscrivent dans notre mémoire les mots de notre foi. On a également établi des grilles de lecture pour mettre en évidence le contenu “théologique” d’un chant[51]. C’est principalement par le chant qu’aujourd’hui se transmet un regard sur Dieu, sur le Christ, sur l’Esprit Saint, sur l’Eglise, sur les valeurs évangéliques…

Depuis une quarantaine d’années, non seulement le contenu doctrinal des textes a changé, mais de nouvelles formes de texte sont également apparues. A l’habituelle forme du cantique à refrain sont venues s’ajouter des hymnes, des tropaires, et des litanies. On constate aussi que la poésie, qualifiée autrefois de “mystique”, est non seulement entrée dans le langage des chants liturgiques, mais elle s’est adaptée aux attentes de la liturgie, de sorte qu’aujourd’hui on peut parler d’une véritable poésie liturgique[52] :

« Depuis le concile de Vatican II, les poètes de langue française et ceux de “toutes les nations qui sont sous le ciel”, selon l’expression des Actes des Apôtres au jour de la Pentecôte, peuvent travailler non dans les à-côtés de la liturgie, mais dans la liturgie elle-même[53]. »

Dès 1947, avec la publication du premier recueil de Gloire au Seigneur, on sent que le ton a changé. On désire abandonner le style des cantiques traditionnels, tels Je suis chrétien ou Vive Jésus ! Vive sa croix ![54], pour s’orienter vers des chants en français qui « pourront être utilisés sans distraire l’attention de l’Action liturgique par excellence » (Cardinal Saliège, Préface de Gloire au Seigneur). Certains textes des trois recueils de Gloire au Seigneur sont toujours chantés actuellement. Citons par exemple, Aujourd’hui dans notre monde[55], Le Christ est monté près de Dieu[56] et Bienheureux le pauvre de D. Rimaud, Toi qui désormais de Patrice de La Tour du Pin[57], Au matin dans la clarté, Gloire à toi, Marie[58] de Louis Aragon et Bernard Geoffroy, Depuis l’aube où sur la terre de D. Rimaud et B. Geoffroy. Depuis, on a écrit de nombreux chants dont le texte est, soit en lien avec l’action liturgique, soit exprime un des aspects du mystère pascal en rapport avec les différents moments de l’année liturgique.

Le texte des chants est désormais inspiré par la Parole et non plus par de pieux sentiments. Le rapport à l’Ecriture est divers. Il peut aller d’une citation à une simple allusion[59]. Le degré poétique du texte sera aussi fonction de sa forme. Les textes les plus poétiques des chants liturgiques sont incontestablement ceux des hymnes.

L’hymne existait dans la liturgie latine[60], mais elle était pratiquée quasi uniquement dans la Liturgie des Heures. C’est en 1966 que D. Rimaud et J. Gelineau proposèrent des formes de chant hymniques en français pour la liturgie eucharistique. Soleil levant et Bois tout en feu demeurent toujours actuellement de remarquables textes poétiques pour la liturgie[61]. Ceux-ci sont pétris d’images bibliques. Nous pouvons les qualifier de mystagogiques, car ils nous font véritablement pénétrer au cœur du mystère célébré. Depuis, l’écriture d’hymnes poétiques pour la liturgie s’est poursuivie[62]. Elle a eu la chance d’avoir – et il y en a encore aujourd’hui – de véritables poètes qui nous ont laissé de merveilleux textes d’hymnes qui sont une expression symbolique et poétique de la foi chrétienne. Citons notamment Patrice de La Tour du Pin, Didier Rimaud et les auteurs de la Commission Francophone Cistercienne (C.F.C.)[63]. L’écriture d’une hymne est très exigeante du point de vue formel. En effet, les strophes d’une hymne doivent être isométriques et isorythmiques. « L’isométrie suppose que les vers correspondants d’une strophe à l’autre ont le même nombre de pieds (de syllabes) ; l’isorythmie exige que les accents prosodiques des vers correspondants d’une strophe à l’autre se trouvent à la même place[64]. »

Avec la réforme de Vatican II, de nouvelles formes de chants sont apparues, notamment le tropaire. Rappelons que celui-ci se compose d’une stance, c’est-à-dire un développement de l’antienne en rapport avec le mystère du jour, d’un refrain et des versets habituellement psalmiques. Il a donc fallu écrire des textes de tropaires inspirés par la liturgie du jour[65]. D’une écriture formelle moins exigeante que l’hymne, le texte d’un tropaire nécessite cependant une certaine dimension poétique. On trouvera de nombreux exemples de tropaires chez les auteurs que nous avons mentionnés pour les hymnes. La CFC a également édité un recueil de tropaires pour chaque dimanche des années A, B et C[66].

On a aussi dû écrire de nouveaux textes pour les “tropes” de la Préparation pénitentielle et de l’Agneau de Dieu ainsi que pour des litanies plus ou moins développées[67]. Il faudrait citer de nombreux exemples. On en trouvera dans le recueil épiscopal de chants pour la francophonie, Chants notés de l’Assemblée (CNA). Citons par exemple :

Comme tropaire, celui de Noël, La lumière née de la lumière[68] :

Stance : La lumière née de la lumière apparaît dans la nuit de Judée

La Parole éternelle du Père nous éveille avec les bergers.

Allons voir dans les bras de Marie,

Dieu qui se fait l’un de nous pour que nous vivions de sa vie.

Refrain : Notre Sauveur est né pour nous, paix sur la terre et gloire à Dieu

1. Le Seigneur m’a dit : Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré.

2. C’est moi qui ai sacré mon roi sur Sion, ma sainte montagne.

3. Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son Fils, né d’une femme.

Comme trope de préparation pénitentielle : Verbe de Dieu[69]

Verbe de Dieu, devenu parole humaine, Jésus Sauveur, Kyrie eleison,

Hymne de Dieu, devenue silence et plainte, Jésus Sauveur, Christe eleison,

Gloire de Dieu devenue rebut des peuples, Jésus Sauveur, Kyrie eleison.

Lumière de Dieu pénétrant notre nuit, Jésus Sauveur, Kyrie eleison,

Splendeur de Dieu sans éclat ni beauté, Jésus Sauveur, Christe eleison,

Image de Dieu défigurée par nos péchés, Jésus Sauveur, Kyrie eleison.

Force de Dieu manifestée dans la faiblesse, Jésus Sauveur, Kyrie eleison,

Amour de Dieu manifesté dans le pardon, Jésus Sauveur, Christe eleison,

Bonté de Dieu triomphant de nos jalousies, Jésus Sauveur, Kyrie eleison.

Comme trope de chant de la fraction : Agneau de Dieu, tu as ouvert le Livre[70]

Agneau de Dieu, Tu as ouvert le Livre, Tu es venu sécher nos larmes, Tu donnes sens à notre vie ! Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous.

Agneau de Dieu, Tu rassembles les peuples, Comme les grains sur les collines, Viennent se fondre au même pain ! Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous.

Agneau de Dieu, Tu nous as rendus libres Et Tu nous as donné la vie Pour mieux nous dire ton amour ! Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, donne-nous la paix.

Comme litanie : Fais paraître ton jour[71]

1. Par la croix du Fils de Dieu, Signe levé qui rassemble les nations ;

Par le corps de Jésus Christ Dans nos prisons innocent et torturé ;

Sur les terres désolées, Terres d’exil, sans printemps, sans amandier.

Fais paraître ton Jour et le temps de ta grâce ;

Fais paraître ton Jour : que l’homme soit sauvé !

2. Par la croix du Bien-Aimé, Fleuve de paix où s’abreuve toute vie ;

Par le corps de Jésus Christ, Hurlant nos peurs dans la nuit des hôpitaux ;

Sur le monde que tu fis Pour qu’il soit beau et nous parle de ton nom :

3. Par la croix du Seigneur, Porche royal où s’avancent les pécheurs ;

Par le corps de Jésus Christ, Nu, outragé, sous le rire des bourreaux ;

Sur les foules sans bergers Et sans espoir qui ne vont qu’à perdre cœur ;

4. Par la croix de l’Homme Dieu, Arbre béni où s’abritent les oiseaux ;

Par le corps de Jésus Christ Recrucifié dans nos guerres sans pardon ;

Sur les peuples de la nuit Et du brouillard que la haine a décimés ;

5. Par la croix du vrai Pasteur, Alléluia ! où l’enfer est désarmé ;

Par le corps de Jésus Christ, Alléluia ! qui appelle avec nos voix ;

Sur l’Eglise de ce temps, Alléluia ! que l’Esprit vient purifier :

6. Par la croix du Premier-Né, Alléluia ! le gibet qui tue la mort ;

Par le corps de Jésus Christ, Alléluia ! la vraie chair de notre chair ;

Sur la pierre des tombeaux, Alléluia ! sur nos tombes à venir :

7. Allélu, alléluia, alléluia ! Allélu, alléluia !

Terminons par la citation d’une hymne : Dieu au-delà de tout créé[72]

Dieu au-delà de tout créé,

Nous ne pouvons que t’appeler

L’Inconnaissable !

Béni sois-tu pour l’autre voix

Qui sait ton Nom, qui vient de toi,

Et donne à notre humanité

De rendre grâce !

Toi que nul homme n’a pu voir,

Nous te voyons prendre ta part

De nos souffrances.

Béni sois-tu d’avoir montré

Sur le Visage bien-aimé

Du Christ offert à nos regard

Ta gloire immense !

Toi que nul homme n’entendit,

Nous t’écoutons, Parole enfouie

Là où nous sommes !

Béni sois-tu d’avoir semé

Dans l’univers à consacrer

Des mots qui parlent aujourd’hui

Et nous façonnent !

Toi, que nul homme n’a touché,

Nous t’avons pris : l’Arbre est dressé

En pleine terre !

Béni sois-tu d’avoir remis

Entre les mains des plus petits

Ce Corps où rien ne peut cacher

Ton cœur de Père !

Comment dire le mystère de Dieu si ce n’est de manière poétique ! Sans doute n’aura-t-on jamais fini d’épuiser le sens de ce texte puisqu’il appartient à l’univers symbolique. On pourrait en faire une analyse comme on étudie un texte de poésie française[73]. Remarquons du point de vue formel son caractère isométrique et l’isosyllabique :

– …… – (1+7) 8

…- … – (4+4) 8

…- (4) 4

… – … – (4+4) 8

… – … – (4+4) 8

. – .…. – (2 +6) 8

… – (4) 4

Après avoir fait l’étude du texte, une question se posera : quelle musique choisir ? Il en existe plusieurs[74] allant du style “classique”, par exemple J. Berthier, à une écriture plus “contemporaine”, par exemple Ch. Villeneuve. Nous devrons seulement alors tenir compte de la qualité de la composition musicale, de son rapport avec la prosodie du texte ainsi que des moyens dont nous disposons pour mettre la musique en œuvre. Toute paroisse n’est pas capable de chanter la version de Christian Villeneuve !

N’y a-t-il vraiment pas de bons chants liturgiques en français ? (4ème partie)

Dans les articles précédents nous nous sommes interrogés sur la qualité du texte et de la musique d’un chant liturgique. Il est certainement important de pouvoir disposer de textes et de musiques de qualité, et nous en avons. Nous disposons aussi de chants pour lesquels le rapport entre le texte et la musique est correct, sinon irréprochable. Mais de tels chants sont-ils nécessairement de bons chants pour la liturgie ?

La musique liturgique : une musique fonctionnelle

La musique dans la liturgie, et donc le chant, a ses lois. Il ne s’agit pas d’écrire des œuvres pour elles-mêmes, de faire de “l’art pour l’art”. Non, l’œuvre musicale destinée à l’action liturgique doit avoir un caractère “fonctionnel”. Peu de musiques contemporaines composées aujourd’hui répondent à ce critère ; beaucoup sont avant tout l’expression de leur créateur. Dans le genre des musiques fonctionnelles demeurent cependant encore aujourd’hui la musique de film. « Le cinéma est en effet ce lieu où la musique, qu’elle soit réalisée spécialement pour le film ou tirée d’une source préexistante, devient quelque chose de différent, jouants son rôle dans un ensemble[75]. » Ne pourrait-on appliquer cette constatation à la musique liturgique ? Celle-ci ne trouve-t-elle pas son sens dans l’ensemble de la célébration liturgique ? Retenons aussi cette réflexion de M. Chion toujours à propos de la musique de cinéma :

« Dans le monde du cinéma, pour peu que le film soit réussi, il n’est pas de musique insignifiante ou inutile, tout prend un sens, tout résonne. De même qu’une boule de verre contient l’enfance et le monde, trois notes de boîte à musique sont au cinéma un monde aussi grand que toute la Tétralogie[76]. »

Audace de la comparaison ! Et l’auteur ne cache pas que la musique au cinéma passionne et divise, que l’on n’hésite pas pour la décrire à utiliser le schéma « grandeur et décadence ». N’en est-il pas de même pour la musique liturgique ? Les quelques notes d’un ton psalmique ne sont-elle pas un monde aussi grand qu’un motet polyphonique ? On raconte que Mozart aurait donné toutes ses œuvres pour la gloire d’avoir écrit le ton de cantillation de la préface romaine ! Pourquoi tant d’admiration pour ces quelques notes sinon parce que celles-ci sonnent étonnamment “justes” . Elles répondent parfaitement à la fonction qu’elles doivent remplir dans l’acte liturgique à savoir permettre la cantillation d’un texte de louange : Vere dignum et justum est, aequum et salutare, nos tibi semper, et ubique gratias agere, Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire, de t’offrir notre action de grâce toujours et en tout lieu. De même pour le ton d’un psaume, sa fonction première est tout d’abord d’assurer la qualité de la psalmodie, ensuite un rapport mélodique correct avec l’antienne qui l’accompagne. Faut-il être un compositeur patenté pour écrire un ton de psaume ? Beaucoup, comme le ton de la Préface que nous évoquions ci-dessus, sont anonymes et ils sont de véritables réussites. Cependant tout ton ne convient pas ; certains ne “fonctionnent” pas. Il faut donc avant tout que le compositeur connaisse bien les différents usages liturgiques de la psalmodie, un psaume responsorial dans la messe dominicale diffère d’un psaume chanté à l’Office monastique, qu’il soit à l’écoute de la Communauté chantante pour essayer de trouver le meilleur ton possible pour la psalmodie à laquelle celui-ci est destiné.

Et que dire d’une antienne, surtout lorsque celle-ci ne se compose que de quelques mots ? Par exemple : Le Seigneur est tendresse et pitié. Comment créer une musique fonctionnelle, juste, intéressante sur cette courte phrase, sachant aussi que celle-ci sera chantée par toute l’assemblée. Christian Villeneuve nous en donne un exemple dans le Psautier des dimanches, année A, n° 146[77].

La musique liturgique : une musique rituelle

Telle est bien la spécificité de la musique liturgique. Celle-ci ne trouve pas sa fin en elle-même : elle est au service d’une action rituelle. Dans cet ensemble de rites qui constituent la célébration liturgique, le chant est parfois lui-même le rite, par exemple le Gloire à Dieu ou l’hymne après la communion. Dans les autres cas, le chant accompagne un rite. Son sens lui est donné par l’action rituelle qu’il sert et réciproquement[78].

Prenons par exemple le rite pénitentiel au début de la messe. Le Missel romain nous propose quatre manières de le mettre en œuvre. Regardons la troisième, celle qui se compose d’invocations adressées au Christ. Celles-ci sont sobres, nullement rédigées comme un examen de conscience. Elles se terminent par une brève invocation destinée à être chantée par toute l’assemblée, du genre Prends pitié de nous. On peut aussi reprendre les mélodies d’un Kyrie grégorien. La musique composée pour cette forme du rite pénitentiel doit avant tout respecter la nature du rite et tenir compte aussi de la place de ce dernier dans un ensemble plus vaste, à savoir celui des rites d’ouverture de la célébration. Il est nécessaire de respecter un équilibre entre ceux-ci. Mais cela dépend aussi du moment dans l’année liturgique, car durant le carême, temps pénitentiel privilégié, on peut développer quelque peu l’acte pénitentiel et de plus, il n’y a pas de Gloire à Dieu. On prend donc conscience que composer pour la liturgie est loin d’être un acte d’expression artistique personnel. Il existe un cahier des charges à respecter pour répondre aux attentes de l’action rituelle[79]. C’est dans le respect des contraintes qu’il faut chercher des compositions qui tentent d’exprimer au mieux ce à quoi l’action rituelle nous renvoie. En effet, un acte rituel n’est jamais fait pour lui-même, sinon on tombe dans le ritualisme : il est là pour exprimer l’inexprimable, nous conduire au-delà de lui-même pour nous faire goûter à la réalité des choses.

Prenons encore le cas de la procession des offrandes. La manière dont cette action se déroule est prévue par la Présentation du Missel romain : « La procession qui apporte les dons est accompagnée par le chant d’offertoire qui se prolonge au moins jusqu’à ce que les dons aient été déposés sur l’autel. Les normes qui concernent la manière d’exécuter ce chant sont les mêmes que pour le chant d’entrée. » (PGMR n° 74) Et voici les propositions, d’ailleurs assez souples, pour la mise en œuvre du chant d’entrée : « Il est exécuté alternativement par la chorale et le peuple ou, de la même manière, par le chantre et le peuple, ou bien entièrement par le peuple ou par la chorale seule. » (PGMR n° 48) Préoccupons-nous donc tout d’abord du texte et choisissons-en un qui exprime bien le sens de “l’offertoire” dans la théologie de la messe de Vatican II. En effet, il s’agit avant tout d’un apport des dons, d’une préparation de la table du sacrifice, le véritable “offertoire” ayant lieu au cœur de la prière eucharistique. On devrait donc plutôt parler d’un “chant pour la préparation des dons” plutôt que d’un “chant d’offertoire” !

1. Préparons la table du festin de Pâques où Jésus se donne à ses invités. Allons à la fête, portant nos offrandes, le pain du partage, le vin de la joie.

2. Quand arrive l’heure de quitter ce monde, Jésus prie son Père et le glorifie. Le pain qu’il partage à tous ses disciples, c’est la vie nouvelle de son Corps livré.

3. Suivons le passage qui nous mène à Dieu : il ouvre la route du plus grand amour.

A sa lecture, nous constatons que ce texte exprime avec justesse le sens de l’apport des dons et le rôle d’ouverture de la grande prière de louange, la Prière eucharistique, que joue ce moment que l’on désigne encore bien souvent par “Offertoire”.

Regardons maintenant la musique que le Père Gelineau (1920-2008) a écrite sur ce texte[80]. Qu’en dirions-nous lors d’une lecture analytique ? Pas d’originalité rythmique : huit fois la même cellule (en C barré, quatre noires, deux blanches – ou une ronde). De même mélodiquement : ambitus de quinte, mouvements conjoints de tierces, quatre fois la même formule… Harmoniquement : système tonal et usage abondant d’accords parfaits. A propos de cette pièce, on parlera très vite d’extrême simplicité, voire de simplisme. Et pourtant, il suffit de l’avoir chanté une fois en situation, c’est-à-dire accompagnant une procession des dons qui épouse le tempo de la pulsation du chant, avec un président d’assemblée qui soigne les gestes de présentation du pain et du vin, pour se rendre compte que ce chant est une véritable réussite de chant rituel pour ce moment de la célébration eucharistique ! Telle est donc la difficulté pour porter un jugement sur un chant liturgique. La valeur et la convenance de celui-ci dépasse la simple analyse formelle du texte, de la musique et du rapport entre les deux. Même si l’on doit être exigeant sur ces trois aspects, on constate que, lors d’une analyse objective du chant, on n’a pas la main mise sur son fonctionnement rituel. On a vu des chants répondre aux critères de qualités textuels et musicaux et ne pas remplir leur rôle sur le plan de la ritualité.

La musique rituelle : un chant d’assemblée

Comme si les critères précédents n’étaient pas encore suffisamment exigeants, voilà qu’il nous faut encore tenir compte de l’acteur principal du chant dans la liturgie ! En effet, le chant liturgique est d’abord celui de l’assemblée, pas par simple décision conciliaire, mais par nécessité théologique. L’assemblée fait l’Eglise. L’union des voix la symbolise. Elle est l’image sonore du Corps du Christ ressuscité. Comment donc par le chant donner voix à l’assemblée. Même s’il ne faut pas sous-estimer ses capacités – Christian Villeneuve nous a montré que l’on pouvait parfois allier musique harmoniquement audacieuse et chant d’assemblée – ni lui réserver uniquement des chant en style “choral” – même si celui-ci a fait ses preuves, ce genre de chant ne respecte pas certaines formes rituelles du chant dans la liturgie – tout chant ne lui convient pas, à cause de difficultés, soit rythmiques, soit d’intonation ou d’étendue mélodiques.

Il faut donc proposer à l’assemblée des chants de qualité qui lui conviennent et certains chants ne sont pas du tout appropriés à cause de faiblesses textuelles ou musicales, sinon les deux ! Cependant il faut savoir que, parmi les chants que nous jugeons bien faits et rituellement adéquats, et que nous lui proposerons, c’est l’assemblée qui, en dernier recours, sera seule juge par la réception qu’elle fera ou non de ces chants. Cette réception, qui s’inscrit dans le temps, nous ne la contrôlons pas. Elle reste mystérieuse. Nous pouvons juste influer sur elle en proposant un répertoire de qualité. Tout un travail a déjà été accompli. En 1990, un premier recueil de chants notés voit le jour : le Missel Noté de l’Assemblée (MNA). Il est le résultat d’une équipe de quatre musiciens liturgistes, H. Delhougne, J. Gelineau, Ph. Robert et J. Thunus. Ceux-ci désiraient proposer à la francophonie, sous la forme d’un “Missel”, non seulement une sélection de chants rituels de qualité qui, durant les quarante années de chant liturgique en français, s’étaient inscrits peu à peu dans le répertoire des assemblées chrétiennes, mais aussi « l’ensemble des éléments chantés grâce auxquels la célébration liturgique peut trouver la “plénitude” que souhait le Concile Vatican II dans sa restauration de la Liturgie[81] ». Si le Missel Noté de l’Assemblée était une œuvre privée, le recueil Chants Notés de l’Assemblée, paru onze ans plus tard, en 2001, est, quant à lui, un ouvrage officiel patronné par les évêques de la francophonie (Belgique, Canada, France, Luxembourg et Suisse). Il se veut, lui aussi, être le témoignage de toute une série de chants qui, depuis parfois une cinquantaine d’années, ont trouvé place dans le répertoire commun des assemblées chrétiennes. Son but est aussi de proposer des chants de qualité qui permettent aux chrétiens de proclamer la foi de l’Eglise[82].

Philippe ROBERT

Musicologue

  1. Joseph Samson, Psaumes-Chorals, Psaumes de la Pénitence, Voix Nouvelles 302D/Hortus 532.
  2. Marcel-Joseph Godard, Petit livre d’orgue, Dix petites Tapisseries, production LPLO.
  3. Marcel Godard, Vêpres de l’Immaculée – Hymnes, SM D2594, 1997.
  4. Roger Calmel, 14 polyphonies pour chœur mixtes, Editions A Cœur Joie, 2006.
  5. Enregistrée par Scalendisc, 1994, disponible aux éditions Voix Nouvelles.
  6. Le CD Hymnes Nouvelles, SM D 2534, donne un bon aperçu des hymnes écrites par J. Gelineau de 1969 à 1981. Pour avoir une idée des différentes formes de chants liturgiques composées par J. Gelineau, on pourra se reporter à l’anthologie Joie et Lumière, SM 12 17.90 (1990).
  7. On pourra écouter les trois tropaires pour le 3ème, 4ème et 5ème dimanche du carême de l’année A sur le CD Baptisés dans le Christ, Chants Liturgiques pour le Catéchuménat, SM 12 22.89 (1994). Les autres compositions qui figurent sur cet enregistrement sont également très intéressantes à découvrir.
  8. Ces deux pièces sont enregistrées sur le CD 12 17.84 SM 63.
  9. Pour une analyse des ces œuvres, voir Philippe Robert, Joseph Gelineau, pionner du chant liturgique en français, Brepols, 2004, chapitre II, Joseph Gelineau, compositeur, p. 39 à 52. Le Cantique des cantiques est enregistré chez SM sous la cote D 2649 (1997).
  10. L’anthologie Chanter Dieu, Jade 33325-2, 1996, propose des chants de J. Berthier interprétés par différentes abbayes pour lesquelles le compositeur a travaillé.
  11. Une autre anthologie, Quand le Seigneur se montrera, SM D 2742, 1999, propose vingt chants destinés aux paroisses. On peut aussi découvrir un autre aspect de la musique de J. Berthier sur le CD Requiem, SM D 2703, sur lequel figurent son Requiem où il mêle le latin et le français, dans une version solistes, chœur et orgue, et son Mater Dolorosa pour chœur a cappella.
  12. Voir D. Rimaud, La collaboration d’un poète avec des compositeurs pour la liturgie catholique contemporaine en langue française, dans La Maison-Dieu n° 212, Paris, Cerf, 1997. Et plus particulièrement les pages 54-63 qui parlent de la collaboration de l’auteur avec Christian Villeneuve.
  13. Trois d’entre eux (Ps 22, 26 et 33) sont enregistrés sur le CD Baptisés dans le Christ, SM 12 22.89. Les partitions de ces trois « Psaumes-Chorals » sont également éditées dans le livret SM L 0225.
  14. Pour une analyse de quelques chants de Villeneuve, voir G. Beyron, Réalisations contemporaines pour la messe et l’Office, Rencontre avec Christian Villeneuve, dans La Maison-Dieu n° 164, Paris, Cerf, 1985. Une anthologie de chants de Ch. Villeneuve figure sur le CD La Bête & la tourterelle, D 2967 SM 62. On trouvera aussi plusieurs chants de ce compositeur enregistrés sur les CD produits par la revue Voix Nouvelles.
  15. Citons par exemple deux de ses chants qui figurent dans le CNA, H 20-35, Envoyés dans ce monde et L 26-92-4 Qui donc est Dieu ?. Il est aussi le compositeur d’une très belle Litanie des saints (YL 26-76-6). Plusieurs de ses compositions ont été publiées par la revue Voix Nouvelles.
  16. Signalons sa Messe de Jérusalem, SM 2003, enregistrée sur le CD D 2976.
  17. Voix Nouvelles a édité sa messe AL 51-39, Messe à N.D. de l’Annonciation et sa messe AL 51-38, Messe festive à St Jean Baptiste.
  18. Elle a notamment composé la Messe de Soissons.
  19. Chants pour la liturgie, volume I, SM D2663 (1997) ; volume 2, SM D 2681 (1998), et Chantons à Dieu, Promotion de Chants pour la liturgie, SM 2903 (2001)
  20. Hymnes du temps de l’Avent, de Noël et de l’Epiphanie (Magnificat 01, 1999), Hymnes du temps Pascal et de la Pentecôte (Magnificat 03, 2000), , Hymnes du temps ordinaire vol. 1 (Magnificat 04, 2001), Hymnes du temps du Carême et de la semaine sainte(Magnificat 05, 2003), Hymnes du temps ordinaire vol. 2 (Magnificat 06, 2003), Hymnes des solennités du Christ et du sanctoral (Magnificat 07, 2004), Hymnes Mariales (Magnificat 08, 2006). Pour plus d’information sur cette série de sept CD, on peut consulter le site de Magificat.
  21. Dès 1965, beaucoup de communautés de religieuses se posaient des questions sur l’Office. Pour y répondre, une session organisée par l’Union des Supérieures Majeures de France d’une part, et le CNPL d’autre part, s’est tenue à Angers en 1966. Les exposés sont publiés chez Fleurus en 1967 dans le n° 8 de la collection Kinnor, Célébrer l’Office divin. Ils sont à la base de la recherche dans le domaine du chant de l’Office monastique. Certains peuvent encore aujourd’hui nourrir notre réflexion sur le sens et la pratique de la Liturgie des Heures.
  22. A la suite de la session de 1967 qui s’est tenue à Boquen, le groupe Chant et Monastère a édité à usage interne un document : Pour chanter l’Office, guide pratique, Abbaye de Saint-André, Bruges.
  23. La musique liturgique doit-elle adopter un langage musical de notre temps – encore faut-il savoir lequel ! – ou doit-elle utiliser des langages musicaux bien assimilés par les fidèles ? Cette question, toujours d’actualité, est complexe et pourrait à elle seule faire l’objet d’un article.
  24. V. Martin, Psalmodies, SM 30M-486, 1972.
  25. Voir par exemple Mlh 140, L’amour du Seigneur, grande antienne pour la Transfiguration, ou Plh 170-1, Il viendra un soir.
  26. C. Geoffray, Huit Psaumes-Chorals pour tous les temps, Paris, Cerf, 1957. On trouve le psaume 97 dans le n° 46 de la revue Choristes.
  27. Le recueil n°5 de la collection Les 2 tables, Viens Seigneur, éditions du chalet 1957 en contient vingt.
  28. On trouve aussi sur ce même disque huit hymnes de Marcel Godard, compositeur dont nous avons déjà parlé dans l’article précédent et sur lequel nous reviendront ci-après.
  29. On pourra découvrir plusieurs chants de Dom Cl. Jacob sur le CD Le Seigneur passe SM 12 23.14 enregistré par les moines d’En Calcat. Quelques chants figurent aussi sur le dernier enregistrement de l’Abbaye d’En Calcat, Le Christ hier et aujourd’hui, Bayard Musique, 2008. Voir aussi fr. Dominique Hermant, Dom Clément Jacob, dans Musiques et Célébrations n° 2, UFFMS, 1977, p. 38-40.
  30. Ces productions monastiques ont été, depuis 1976, soumises au jugement d’un groupe constitué de musiciens de métier et des maîtres et maîtresses de chœur de monastère. Celui-ci prit le nom de Trirem : Tri du Répertoire Monastique. Ce groupe existe toujours aujourd’hui et se réunit deux fois par an. Deux fois par an, il publie par abonnement un bulletin avec les partitions retenues. Les cotes de celles-ci donnent l’année et le numéro d’ordre dans l’année. Un grand nombre des partitions avec le label Trirem ont été éditées par la SODEC (Livre d’Heures d’En Calcat). Depuis 1999, c’est l’éditeur Kinnor-Trirem qui a pris le relais. Les fiches éditées par la Sodec et par Kinnor sont disponibles au SECLI (Secrétariat des Editeurs de Chants pour la Liturgie – voir le site www.secli.cef.fr )
  31. Voir par exemple Le temps s’enfuit (Trirem 84-41) et Unique désir (Trirem 84-40).
  32. Voir par exemple l’hymne P 17-61, Dieu, mystère du monde.
  33. En 1993, la Promotion épiscopale française destinée à établir un répertoire paroissial de qualité retenait F 11-49-2, Dans l’ombre d’une étable, de cette compositrice.
  34. J.-L. Florentz note qu’il a conçu cette partition « soit pour une paroisse ayant un orgue et utilisant une chorale, soit pour une communauté monastique disposant d’un orgue ». Trirem ajoute « qu’ évidemment cette pièce est pour groupe exercé » !
  35. Ces vêpres sont enregistrées sur le CD Vêpres de Saint Bernard, SM 12 18.04, 1990. Signalons aussi l’hymne du soir P 36-72-1, Offrir ce jour et l’hymne pour la fête de la Présentation F 11-39-1, Voici deux tourterelles. On pourra aussi écouter son Oratorio pour la paix, un signe pour aujourd’hui, Bayard Musique, 1999.
  36. « Chef de chœur professionnel et chef d’orchestre, Stéphane Caillat est également compositeur, professeur de direction de chœur, membre de jurys internationaux…Dans un passé récent, il a été Directeur du Centre d’art polyphonique de Paris et du Festival d’art sacré de la Ville de Paris, et a occupé divers postes à Radio-France et au Conservatoire National Supérieur de Musique. » Site www.stephanecaillat.net
  37. Deux enregistrements des compositions de Stéphane Caillat sont parus autrefois : De l’ombre à la lumière (Carême – Jours saints – Pâques) SM K 473 et Pleine de grâce, réjouis-toi, Office de la Vierge Marie, SM 30 14.31.Les chants de cet enregistrement ont été publiés dans un livret du même nom, SM L088, 1986. Vient de paraître tout récemment Voici la lumière ! Office de la présentation du Seigneur. Voir le site internet : www.la-cotellerie.com
  38. On peut aussi se reporter à la présentation de ce compositeur dans Servir n° 2 – 2006, p. 5-14.
  39. Ces chants figurent dans le Missel Noté de l’Assemblée. Seul le second a été repris dans le Chant Noté de l’Assemblée.
  40. Quarante-huit chants de ce compositeur sont actuellement répertoriées dans les Tables de Trirem. On peut consulter celles-ci sur le site de l’Abbaye de Tamié : www.abbaye-tamie.com
  41. Voir M. Godard, Psaumes pour une communauté, dans Musiques et Célébrations n° 7, UFFMS, 1979, p. 17-21.
  42. Cithare dans la nuit (1976-77) et Itinéraire en Haute-Provence (1978-80), un ensemble de 18 pièces enregistrées sur le disque Espace 3, SM 37 30979.
  43. Voir L. Gregoire, Un compositeur Trirem : Le Père Marcel-Jospeh Godard, dans Liturgie n° 100-101, 1997, p. 102-112.
  44. Marcel Godard, Une musique aux nombreuses demeures, SM D2426, 1995. On trouvera aussi de nombreuses pièces de M. Godard enregistrées par les moines de Tamié dans la série des 9 CD, Office à l’Abbaye de Tamié, Louange au long des jours, SM D2468, D 2580, D2581, D2637, D2632, D2644 et D2654, 1995-1997. Dans cet ensemble, figurent aussi plusieurs pièces de Stéphane Caillat et d’Henri Dumas.
  45. Le site du SECLI recense 140 de ses compositions.
  46. Humble Sauveur, Le chant des moines de Tamié, Bayard Musique 2008.
  47. Le CD Espérance de la Gloire, SM D2500, 1996, enregistré par les moines de Tamié, est un bon exemple d’hymnes et de tropaires monastiques des différents compositeurs que nous avons évoqués.
  48. Voir P. Robert, Répertoire monastique et répertoire paroissial, dans Liturgie n° 100-101, 1997, p. 46-70.
  49. Voir le n° 68 d’Eglise qui chante, 1966.
  50. M. Scouarnec, Dis-moi ce que tu chantes, Cerf, 1981.
  51. M. Scouarnec Chant liturgique et confession de foi, dans La Maison-Dieu n° 134, Cerf, 1978, p. 47.
  52. Voir D. Rimaud, Langue française, musique(s) et liturgie, point de vue d’un auteur, dans Création musicale et Musique liturgique d’aujourd’hui, Bulletin de l’Institut catholique de Lyon, n° 99-100, 1992, p. 77-86.
  53. Loc. cit., p. 80.
  54. Vient de paraître un CD, Cantiques catholiques de toujours, qui reprend un certain nombre de ces cantiques qui ont connu un succès populaire parfois depuis le XVIIe siècle jusqu’à Vatican II.
  55. Voir par exemple l’harmonisation de M.Godard dans le numéro spécial, Répertoire liturgique à trois voix mixtes de Choristes, 1990.
  56. La musique de César Geoffray a été réharmonisée par H. Dumas dans Choristes n° 118.
  57. Voir la présentation de ce texte dans Voix Nouvelles n° 17 avec une musique de J. Gelineau.
  58. De ce chant, nous avons mentionné la musique de J. Langlais dans notre premier article.
  59. Voir l’article de M. Coste, Inspiration biblique et langage symbolique, dans Feu Nouveau 46 n° 4, 2003, p. 6-12. Egalement M.-P. Faure, Bible et poésie. Ecouter la Parole, écrire des hymnes, dans Liturgie n° 141, 2008, p. 133-157.
  60. Voir le recueil des 291 hymnes latines qui ont été traduites en français : Hymnes de la Liturgia Horarum, Desclée, 1990.
  61. On peut lire ces textes dans D. Rimaud, Les arbres dans la mer, Desclée, 1975, p. 111 et 126.
  62. Pour une étude de l’hymne dans la liturgie en langue française, voir notamment La Maison-Dieu, n° 92, 1967, Ph. Robert, La redécouverte de l’hymne, dans Joseph Gelineau, pionnier du chant liturgique en français, Brepols, 2004, p. 119-152, D. Rimaud, L’art de l’hymne, dans Catéchèse, n° 167, 2002, p. 89-98.
  63. Voir l’anthologie de D. Rimaud publiée aux éditions du Cerf : Anges et Grillons (2008), A force de colombe (2007) et A l’enseigne de Pâque (2007). Les textes de la CFC sont parus dans plusieurs recueils, La nuit, le jour (Desclée 1973), Guetteurs de l’aube (Desclée 1976), Sur la trace de Dieu (Desclée, 1979), Prières aux quatre temps (Centurion, 1986) ; ensuite dans la revue Liturgie (plus particulièrement les n° 66, Fête sur nos places, n° 95, “A toi mes hymnes, Seigneur”, n° 107, Recueil d’hymnes, n° 116, Hymnes pour l’année jubilaire… On peut aussi retrouver l’ensemble des textes de la CFC sur le site www.cfc-liturgie.fr.
  64. Vade mecum pour la composition de chants liturgiques, ACCREL, SECLI, SNPLS, p. 5. Document téléchargable sur le site du SECLI : secli.cef.fr. Aller ensuite sur le rubrique “Infos”.
  65. Sur la redécouverte du tropaire, voir Ph. Robert, op. cit., p. 93-113.
  66. CFC, Tropaires des dimanches, Livre d’Heures D’En Calcat, Dourgne, 1980.
  67. Le phénomène du trope est bien connu des spécialistes de la musique médiévale. Il s’agissait d’inscrire sous les notes d’une longue vocalise grégorienne un texte pour en faciliter la mémorisation ; A chaque note correspondait une syllabe. Remarquons que les messes grégoriennes portent encore le nom du trope qui figurait sous le Kyrie. Par exemple, la messe XI s’appelle : Orbis factor.

    « Troper » signifie donc « trouver » – l’origine du mot « troubadour » vient d’ailleurs de l’ancien français tropare, « faire des tropes ». Il s’agira donc de trouver des textes qui développent certaines formules. Par exemple l’expression kyrie eleison devient Omnipotens genitor, Deus omnium creator : eleison. (Dieu, puissant créateur de toute chose, prends pitié de nous). Il suffit de rapprocher cet exemple des trois propositions de la troisième forme de la prière pénitentielle données par le Missel romain (1978), par exemple Seigneur Jésus, par ton mystère pascal tu nous as acquis le salut,, prends pitié de nous, pour voir le rapport qui existe entre le développement textuel de le formule, Seigneur, prends pitié, et le phénomène du trope du Moyen âge ! Cependant aujourd’hui, il ne s’agit plus de mettre un texte sous une mélodie existante, mais de développer le texte et ensuite de trouver une mélodie pour ce développement textuel.

  68. Texte Gelineau/Rimaud CNPL.
  69. Texte de D. Rimaud.
  70. Texte de J. Akepsimas
  71. Texte de D. Rimaud
  72. Texte de D. Rimaud.
  73. Voir le commentaire du fr. David, Dieu au-delà de tout créé, Au cœur de la Révélation, dans Didier Rimaud, notre ami, Liturgie n° 127, décembre 2004.
  74. Le site du SECLI en retient cinq : celle de J. Gelineau (H10-89-5), celles de A.-M. Haenni, J. Berthier, Ch. Villeneuve et H. Dumas, respectivement cotées HLH 103, 103-2, 103-3, et 103-4.
  75. M. Chion, La musique au cinéma, Paris, Fayard, 1995, p. 9.
  76. Idem, p. 15.
  77. Psautier des dimanches, année A, Document n° 18 d’Eglise qui chante, 1986. Ce document, ainsi que les autres Psautiers de la collection, est intéressant pour voir comment différents compositeurs – certains nous les avons mentionnés dans nos articles précédents et d’autres non car il sont avant tout des compositeurs de musique liturgique – ont traité musicalement le genre de l’antienne. On pourrait aussi faire une étude musicale de celui-ci depuis les premiers recueils d’antiennes écrits pour les “Psaumes-Gelineau” en 1953 jusqu’à aujourd’hui. Beaucoup d’antiennes sont des réussites dans le genre de la musique fonctionnelle. On constatera que, dans ces recueils d’antiennes, on rencontre tous les styles musicaux : tonal, modal de différents genres, contemporain…
  78. Sur la ritualité du chant dans la liturgie, on pourra se reporter aux ouvrages suivants : J.Gelineau, Les chants de la messe dans leur enracinement rituel, Cerf, 2001 ; Ph. Robert, Chanter la messe, Editions de l’Atelier, 2000 ; M. Wackenheim, Pour chanter la messe, Bayard Presse, 2005 ; Ph. Robert, Joseph Gelineau, pionnier du chant liturgique en français, Brepols, 2004 et plus particulièrement Un compositeur au service de la liturgie, p. 44 –46 ; CNPL, Exultet, Encyclopédie pratique de la liturgie, Bayard, 2000, p. 328-333 ; Dans vos assemblées, coll. sous la direction de J. Gelineau, Desclée, 1998, n° 11, Célébrer avec chant et musique, p. 153-167, et n° 30, Les chants de la messe, p. 426-437.
  79. On peut prendre conscience de ce cahier des charges en consultant le Vade mecum pour la composition de chants liturgiques, ACCREL, SECLI, SNPLS, Document téléchargable sur le site du SECLI : secli.cef.fr (rubrique “Infos”).
  80. La mélodie figure dans Chants notés de l’assemblée, n° 232 ; la polyphonie, sur la fiche B 21-85 ; l’enregistrement sur le CD Aux quatre chemins de l’Evangile, Messe “Nous venons vers Toi”, BPSA CD 10300, 1996.
  81. Voir la Préface du Missel Noté de l’Assemblée, Brepols, 1990.
  82. On lira avec intérêt la Préface de ce recueil, Chants notés de l’assemblée, Bayard – AELF, 2001. Les accompagnements de tous les chants du CNA ont fait l’objet d’un CD-rom, paru chez Bayard en 2008. Signalons aussi l’ouvrage Chrétiens en prière (CEP), publié également sous la responsabilité de l’épiscopat francophone. Ce recueil édité chez Fleurus – Magnificat en 2007 est destiné à la réalisation en paroisses d’offices inspirés par la Liturgie des Heures.